jeudi 19 mai 2011

Rapport au Parlement fédéral : La gestion des indemnités de l’assurance maladie-invalidité


Dans son rapport, la Cour des comptes examine les contrôles destinés à détecter et récupérer les indemnités d’assurance maladie-invalidité qu’il arrive aux mutualités de payer par erreur. La Cour constate que les délais de détection des indus et les interdictions de récupération prévues par la charte de l’assuré social ne sont pas toujours respectés. Si la Cour estime les contrôles utiles, elle recommande une approche globale qui met en lumière les moyens mis en œuvre et les résultats financiers obtenus. La Cour analyse aussi les sanctions et incitants destinés à promouvoir les contrôles internes efficaces. Ces sanctions ne sont pas proportionnées aux pertes financières qu’une récupération peu rigoureuse entraîne.
Lorsqu’un assuré social est incapable de travailler pour raisons médicales, il a droit à des indemnités qui compensent sa perte de salaire. C’est l’Institut national d’assurance maladie-invalidité (Inami) qui organise ce régime d’indemnisation avec les mutualités. Ces indemnités se sont élevées à plus de 4,9 milliards d’euros en 2009.

En calculant et en payant les indemnités d’assurance maladie-invalidité, les mutualités peuvent commettre des erreurs. Les conditions d’octroi sont, en effet, nombreuses et exigent de vérifier périodiquement plusieurs données externes relatives à l’assuré social. Des indemnités peuvent dès lors être payées alors qu’elles ne sont pas dues.

Dans son rapport, la Cour des comptes évalue les contrôles que l’Inami et l’Office de contrôle des mutualités (OCM) ont mis en œuvre pour assurer la détection et la récupération des indemnités que les mutualités ont payées par erreur. La Cour se penche également sur les paiements que les mutualités ne récupèrent pas et sur la politique de l’Inami en matière de renonciation à la récupération. La Cour examine aussi l'impact de la charte de l'assuré social sur la récupération des indemnités indues. Elle analyse, enfin, les sanctions et incitants financiers destinés à promouvoir les contrôles internes efficaces au sein des mutualités.

La Cour constate des lacunes dans les procédures de détection et de récupération. Ainsi, les mutualités ont deux ans pour détecter les indemnités payées par erreur. Passé ce délai, ces indemnités sont irrécupérables et restent à la charge du régime. Or, elles ne sont pas toujours détectées à temps. Les contrôles de l'Inami le révèlent, sans chiffrer ces pertes financières.

Depuis 1997, la charte de l'assuré social interdit, en outre, de récupérer les indemnités payées par erreur à un assuré social de bonne foi. Pourtant, l’Inami et les mutualités continuent en général à récupérer dans pareils cas. Depuis 2009, ils se fondent sur la loi relative à l'assurance maladie-invalidité qui accorde un an aux mutualités pour récupérer les indus résultant d'une erreur de leur part. Selon la Cour des comptes, cette interprétation n’offre pas de garanties juridiques suffisantes, alors qu’il appartient à l’Inami de veiller à l’application correcte de la charte par les mutualités.

Dans la procédure qui lui permet de renoncer à récupérer des indus, l'Inami devrait d’abord vérifier la légalité de la récupération au regard de la charte. 

D’une manière générale, la charte de l’assuré social a renforcé la nécessité d'un contrôle interne efficace dans les mutualités pour éviter d’octroyer des indemnités par erreur. 

Si les contrôles administratifs et thématiques que l’Inami organise sont utiles, ils ne donnent pas une image complète des contrôles internes instaurés dans les mutualités. Ainsi, l'Inami n'est pas en mesure de chiffrer globalement les indus que chaque mutualité détecte. Il ne peut pas non plus suivre leur récupération. Les contrôles qu’il mène avec l'OCM ne permettent, du reste, pas de comparer les moyens humains et techniques affectés au contrôle interne dans chaque mutualité. La Cour des comptes recommande dès lors une approche plus globale des processus de contrôle interne, qui met en lumière les moyens mis en œuvre et les résultats financiers obtenus.

Des sanctions et incitants financiers sont, en outre, prévus pour promouvoir auprès des mutualités les contrôles internes efficaces. Dans ce cadre, le système de responsabilisation des mutualités, géré par l’OCM, prévoit de leur octroyer des frais d’administration qui varient en fonction de la qualité de leur gestion. Ce système n'intègre toutefois pas les procédures destinées à garantir le paiement correct des indemnités. La Cour recommande que ces procédures figurent parmi les critères d’octroi des frais d’administration.

Par ailleurs, dans le contexte spécifique des règles de prescription et de la charte de l'assuré social, les mutualités ne prennent pas en charge les indus irrécupérables par leur faute. Les sanctions prévues par la loi ne sont, de plus, pas en rapport avec les pertes financières dues à des procédures de récupération qui manquent de rigueur. La Cour des comptes invite donc à envisager de mettre ces indus à la charge des frais d’administration des mutualités.

Enfin, à titre d’incitants, les mutualités reçoivent un pourcentage des montants récupérés auprès des assurés sociaux. Il n’est cependant pas fonction de la charge de travail requise pour récupérer l'indu. La Cour considère que, pour le calcul de cet incitant, on pourrait distinguer les récupérations liées aux accidents de travail ou aux maladies professionnelles des récupérations de droit commun. Les premières requièrent, en effet, un faible travail administratif, alors que les secondes nécessitent généralement un travail important et des procédures judiciaires.

La ministre des Affaires sociales et de la Santé publique s’est engagée à veiller à ce que l’Inami ait un meilleur aperçu de l’origine et du suivi des paiements indus. L’Institut devra par ailleurs prendre en compte la gestion des indus lors de l’évaluation du fonctionnement des mutualités par des indicateurs de performance et de qualité.
COUR DES COMPTES - REKENHOF